E.S. 1025 ou les mémoires d'un Anti-Apôtre

PROLOGUE

Comment commencer un livre quand on n'est pas écrivain, ou plutôt comment expliquer qu'on croit de son devoir de faire éditer des Mémoires... des Mémoires assez terribles (et justement parce qu'ils sont... si affreusement inquiétants...) ?

Alors, disons que ces premières pages sont un .appel aux catholiques de ce temps sous forme d'avant-propos ou peut-être faudrait il dire de confession. Oui, "confession" en ce qui me concerne, "pauvre petit moi", paraît le mot juste, bien que ce soit un de ces mots que plus personne, en ce temps, ne désire employer. Enfin, quand je dis "plus personne", je veux seulement désigner ceux qui croient faire preuve d'intelligence en se mettant au goût du jour, et même au goût d'après demain.

Quand à moi, je ne trouve qu'un mot archi-banal pour expliquer ma propre position, je dirai que ce goût du jour, que ce goût du soi-disant sens de l'histoire, n'est que "de cendres" pour moi.

Mais, Seigneur, vous savez bien que je crois fermement que Vous êtes le plus fort. Est-il nécessaire de le préciser ? Oui... en ce aujourd’hui... oui... je crois que c'est indispensable, car les gens mettent leur confiance maintenant en la puissance de l'homme... une puissance qui lance des fusées, mais qui laisse aussi mourir de faim... une puissance qui fait travailler la machine, mais qui en est aussi l'esclave écrabouillé... une puissance qui prétend n'avoir plus besoin de Dieu, mais qui sait aussi tricher en discutant de la création du monde.

Il faut que je me taise, que je me calme. Tout ce qui précède est seulement destiné, par pudeur, à retarder le moment où je devrai me présenter au lecteur.

Voilà, je ne suis qu'une petite infirmière, qui a cependant déjà vu mourir beaucoup de gens et qui continue de croire en la Miséricorde de Dieu, et qui expérimenta souvent combien la Volonté de l'Invisible sait souffler au bon moment.

Je ne suis qu'une infirmière et j'ai vu, dans un pays que je ne nommerai pas, dans un hôpital qui doit rester anonyme, j'ai vu mourir, des suites d'un accident d'automobile, un homme sans nom, sans nationalité, je veux dire : sans papiers.

Cependant, il avait, dans son cartable, des documents que je fus bien obligée d'examiner. L'un d'eux commençait par ces mots :

"Je suis l'homme sans nom, l'homme sans famille, sans patrie et sans héritage."...

Apparemment ce texte, d'une centaine de pages dactylographiées, ne pouvait fournir aucun élément permettant d'identifier le blessé. Mais sait-on jamais ? Et, puis, soyons honnête, puisque j'ai parlé de confession, soyons donc tout à fait franche : j'eus envie de lire ces notes intimes et je cédai relativement vite à cette tentation.

Je ne pouvais pas me douter, en lissant ma curiosité féminine étouffer mes scrupules d'infirmière, non je ne pouvais pas me douter que j'allais tomber sur un document vécu qui me bouleverserait et m'accablerait. Car ce texte était trop grave pour être simplement jeté au feu ; il était trop "actuel" pour être mis entre n'importe quelles mains ; il paraissait trop véridique pour que moi, moi surtout, moi, l'ancienne protestante convertie à la Sainte Église catholique et immortelle, à la Sainte Église où il n'était demandé que d’essayer pratiquer une petite (ou grande) mais surtout persévérante sainteté, moi enfin, je ne fasse pas passer la défense de mon Église Sainte avant toute autre considération. Oh ! je sais bien que Dieu n'a pas besoin d'être défendu, n'a pas besoin de moi, mais je sais aussi qu'il pouvait autrefois me laisser dans l'erreur, dans la tristesse des questions sans réponse, dans l'atmosphère de souveraine outrecuidance qui maintient, par exemple, depuis quatre siècles, les catholiques d'Irlande dans des ghettos dont les lois (prétendues légitimes et sacrées) font office de barbelés. Non pas que je sois Irlandaise, ne cherchez pas qui je suis, vous ne trouverez jamais. Mais les Irlandais, sans le savoir, m'ont aidée à faire preuve d'un peu de courage. Et qu'au moins, ce tout petit témoignage atténue ce que des âmes de haute sagesse et de haut grade oublient d'accomplir.

Mais mon blessé n'était pas Irlandais non plus, il paraissait plus ou moins slave. Quelle importance, du reste, puisqu'il ne pouvait plus parler !

J'essayai pourtant d'obtenir de lui quelques renseignements, en lui demandant de fermer les paupières chaque fois qu'il voudrait me répondre par l'affirmative. A ce moment-là, je n'avais pas encore lu le document qu'il transportait avec lui ; et, du reste, il ne voulut pas répondre à mes questions, ou n'en eut pas la force... comment le saurai-je ?

C'est donc seulement après sa mort que je pus me rendre compte, en prenant connaissance de ce texte, qu'il avait dû souffrir mille fois plus que de ses multiples blessures et fractures, en pensant à ces quelque cent pages qu'il n'aurait jamais dû avoir la faiblesse d'écrire.

Si j'avais connu l'immense pouvoir, l'incroyable importance de cet homme réduit à l'état de pantin disloqué, j'aurais peut-être trouvé les mots qu'il avait besoin d'entendre, j'aurais peut-être pu détruire la carapace qu'il s'était inventée pour cacher son dépit (pourquoi ne pas dire sa souffrance, tout simplement). Une carapace, même consolidée par le travail des ans, cela peut aussi se détruire en un centième de seconde. Dieu le sait et les Saints le savent.

Mais j'étais uniquement occupée par mon travail d'infirmière... enfin non, ce n'est pas tout-à-fait vrai, car, pour moi (et cela ne se trouve ni dans mes livres, ni dans mes cours, ni dans mes examens) pour moi, la prière est complémentaire des gestes médicaux.

Et je priais pour cet homme dont m'avait déjà dit, du reste, qu'il ne possédait aucun papier d'identité.

Je lui donnais un nom. Je l'appelais Michaël, car cet archange-là m'a souvent aidée et ce mot latin me console de devoir entendre, dans nos nouvelles cérémonies religieuses, aussi bruyantes que nos rues, nos stades et nos radios, tous ces nouveaux mots auxquels on a donné l'adjectif de vernaculaire pour nous impressionner et nous faire taire. Car tout cela est de la comédie, tous ces discours où l'on nous invite à participer comme des adultes (alors que le Christ, appelait, Lui, les petits enfants) n'est qu'une dérision qui essaye de camoufler un autoritarisme ironique et cruel, mais susceptible de se retourner contre lui-même.

Donc, je priais pour cet homme, en le nommant Michaël, et sans savoir qu'il était un de nos pires ennemis. L'eussé-je su que mon devoir de chrétien eût toujours été de prier pour lui, et faire prier pour lui, avec une ardeur sans pareille.

Maintenant, je fais dire des messes, mais il est si difficile d'en trouver qui gardent l'absolue apparence d'un Sacrifice mille fois saint et non pas la pitoyable allure d'un gentil repas, fraternellement philanthropique ! Hélas, trois fois hélas !

Michaël avait un regard inoubliable, mais dans lequel je ne savais pas lire.

Après avoir pris connaissance de ses confidences, j'essayais de ressusciter en moi la puissance de ce regard, pour y découvrir ce qu'il aurait voulu que je fisse de ses mémoires.

Et d'abord pourquoi les avait-il écrits ? N'y avait-il pas là une marque de vraie faiblesse, peut-être l'unique faiblesse dangereuse à laquelle il eût jamais cédé... Quel fût son mobile ? Était-il de domination ou de consolation ? … Dieu seul le sait.

Aujourd'hui, j'ai rencontré une amie qui souhaiterait que ce texte fût édité. Mais en ai-je le droit ?

Et ma plus grande désolation consiste à constater que jamais Je n'aurai l'envie de poser cette question là en confession, comme Je l'eusse fait, il y a encore quelques années. Non, la Très Sainte Vertu d'Obéissance est aujourd'hui l'arme extrêmement puissante dont nos ennemis, qui se prétendent nos amis, se servent contre ce que nous fûmes et pour établir ce qu'ils ont décidé de nous faire devenir.

En un mot, ce "devenir" peut se décrire, car il est connu, il a déjà quatre siècles d'existence et se nomme : protestantisme. Voilà, nous sommes invités, petit morceau par petit morceau, petite obéissance par petite obéissance, de fausse humilité en faux remords, de charité mensongère en ambiguïté trompeuse, de paroles déguisées en épées à double tranchant dont le oui est non et dont le non est oui, nous sommes invités à faire semblant de rester bons catholiques tout en étant de parfaits protestants. C'est génial, encore fallait-il y penser.

Oui, telle est aujourd'hui la Chrétienté qu'on prétend nous faire aimer.

Mais l'Histoire nous apprend qui est le plus Patient, qui est le plus fort, qui est le plus Fidèle.

Et que Michaël me pardonne si je dévoile son rôle, car c'est pour son bien et le nôtre... "Ad majorem Dei Gloriam."

E.S. 1025 ou les mémoires d'un Anti-Apôtre

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